* homélie du 5e dimanche de carême (26.3.2023)

par Francis Roy, diacre

Ce 5ième dimanche de Carême est un moment charnière dans notre marche vers Pâques, vers la Résurrection, vers la vie ! La semaine prochaine ce sera le dimanche des Rameaux. Allons-nous entrer dans Jérusalem et suivre Jésus pour vivre avec lui la semaine sainte ?

Au lendemain du mercredi des cendres, la première lecture de la messe était extraite du livre du Deutéronome ou Moïse parle au peuple « Je te propose aujourd’hui de choisir ou bien la vie et le bonheur, ou bien la mort et le malheur. » Aujourd’hui Jésus est loin de Jérusalem quand il apprend la mort de son ami Lazare ; et il décide de retourner en Judée. Ses apôtres ne sont pas très enthousiastes : «Rabbi, tout récemment, les Juifs cherchaient à te lapider, et tu retournes là-bas ? » Les disciples n’y voient qu’une occasion de risquer sa peau. Jésus, obéissant à son Père, y va, lui, pour donner sa vie ! Thomas, lui aussi, a décidé : « Allons-y nous aussi, pour mourir avec lui ! » Mais pourquoi mourir alors que Dieu nous invite à la vie et au bonheur ?

Restons concentré au cœur de cet Evangile que l’on a peut-être trop entendu : nous connaissons bien la fin avec Lazare qui sort du tombeau, heureux dénouement digne d’un film. Mais nous ne sommes pas en train d’assister à la cérémonie des Césars pour remettre le prix du meilleur scénario ou du meilleur premier rôle. Nous sommes les auditeurs et les destinataires de la Parole que Dieu nous adresse, par l’intermédiaire d’un témoin oculaire, l’apôtre Jean. Et comme souvent, dans les récits johanniques, la situation présentée cherche à nous faire découvrir par nous-mêmes quelque chose de plus profond dans l’ordre de la foi, pour que notre intimité avec Dieu progresse.

Dans l’Evangile de Jean, le retour à la vie de Lazare est le septième et dernier signe accompli par Jésus, avant sa propre mort et sa résurrection des morts. Le premier signe fut lors des noces de Cana. Bien que son heure ne fut pas encore venue, il changea l’eau en vin. A Béthanie, il change la mort en vie, en ramenant à la vie, au sein de sa famille et de ses amis, un mort de quatre jours, enfermé dans son tombeau, ligoté dans son linceul et dans ses bandelettes. Chez Jean, les signes sont toujours présentés pour croire. Et croire, c’est avoir la Vie. Pas seulement la vie éternelle, mais la Vie qui nous fonde en tant qu’homme ou femme, ici et maintenant, une Vie sacrée et qui a du sens, à laquelle Dieu accorde un prix inestimable.

Il nous alors faut ouvrir l’oreille intérieure pour entendre cette parole, car les bruits du monde, avec ses événements sensationnels et ses bateleurs de foire, recouvre le silence où parle cette Parole que nous n’entendons parfois plus. Ce signe de Jésus se présente en quatre tableaux successifs, et pour chacun d’eux, Jésus parle. Avec ses disciples, avec Marthe et Marie, à son Père et enfin à Lazare.

Premier tableau, avec les disciples. L’attitude de Jésus, pendant trois jours, nous étonne, nous rend mal à l’aise. Les disciples aussi sont mal à l’aise : ils ont du mal à comprendre ce qui pousse Jésus à attendre pendant que Lazare est malade, puis ce qui décide Jésus à se rendre à Béthanie au moment où il leur annonce que Lazare est mort, et malgré les risques qu’il encourt pour sa propre vie. Donc… Jésus attend avant de venir à la tombe de Béthanie. En cela, Jésus ne nous fait pas la promesse que nous échapperons à la mort. Notre vie biologique s’arrêtera un jour. Jésus n’a pas empêché la mort de Lazare, ni sa propre mort sur la croix. L’essentiel à retenir, dans ce premier tableau, c’est que, dès qu’il y a mort, le Christ se met en marche, avec ses disciples, donc avec nous, pour que le néant de la mort puisse devenir Vie.

Le deuxième tableau, le dialogue avec Marthe, est d’une toute autre intensité. Avec elle, nous commençons par reprocher à Dieu : « Seigneur, si tu avais été là ! ». Oui, mais contrairement aux disciples, Marthe, malgré la peine et la souffrance, prononce une Parole d’espérance, conforme à la prophétie d’Ezékiel : la foi en la résurrection au dernier jour. Alors, à partir de cette confession de foi, Jésus invite Marthe à accomplir un pas supplémentaire, décisif, à entrer dans le mystère par excellence. Jésus l’appelle à aller encore plus loin : « oui, Seigneur, je crois que toi, tu es la résurrection et la vie. » C’est notre profession de foi chrétienne. Et Jésus ajoute : « Tout homme qui vit et qui croit en moi ne mourra pas ». Croire et vivre : deux verbes que Jésus rend non séparables, car la foi est au service de la vie, de la vraie vie, celle qui nous fonde dans l’amour, celle que l’on a reçue et que l’on ne s’est pas donnée. « Crois-tu cela ? » nous dit Jésus. Librement, nous pouvons répondre : « oui, Seigneur ». Même si, peut-être, cet acte de foi colossal ne va pas toujours de soi dans notre vie, en fonction des événements que nous affrontons. Mais le Seigneur nous attend toujours pour venir à sa rencontre, comme il fait appeler Marie après son dialogue avec Marthe.

Le troisième tableau est celui de l’intimité. Jésus pleure. Jésus frémit. Jésus éprouve et partage la peine et la souffrance. Jésus ne dit plus rien. Comme parfois, devant un lit d’hôpital, ou dans une morgue, le silence est la seule réponse possible au réel. L’humanité de Dieu, si on pouvait en douter, s’exprime dans ce troisième tableau dans sa totalité. La prière, le dialogue avec le Père est le seul dialogue alors possible, car le Père exauce la prière du Fils. Jésus demande alors d’enlever la pierre. Quand nous apportons de la chaleur humaine à quelqu’un plongé dans l’obscurité de la souffrance, dans une mort à lui-même, nous enlevons la pierre et nous nous en remettons au Seigneur. Car sans lui, nous ne pouvons rien faire.

Le quatrième et dernier tableau est un cri : « Lazare, viens dehors ! ». Jésus cria d’une voix forte deux fois : au moment de sa propre mort sur la croix, et pour que Lazare vienne dehors : « Sors de l’ombre de la mort, sors du néant, quitte ce suaire qui t’enserre, quitte ces bandelettes qui empêchent de te mouvoir, viens revivre et respirer un air nouveau, viens à la lumière qui donne sens et consistance à ta vie. » Lazare est ici la figure du peuple en marche qui cherche à se libérer, qui cherche un sens définitif à son existence. En cela, le retour à la vie de Lazare n’est pas une fiction. C’est un événement, à la fois historique et contemporain qui se vit dans la foi, aujourd’hui.

« Vous saurez que je suis le Seigneur, quand j’ouvrirai vos tombeaux et vous en ferai sortir, ô mon peuple ! » Notre Dieu nous fait vivre, mais pour le suivre le chemin passe par la mort de la Croix : il est passé par là, et il nous attend maintenant, ressuscité dans le pain et le vin. Alors « Allons-y nous aussi, pour mourir avec lui ! » Et vivre avec Lui !

Amen

26 mars 2023 |

* Mgr Hérouard à Saint-Joseph le 19 mars !

                                                                                                                                 Mgr Hérouard a célébré la messe de 10 H 30 du 4e dimanche de Carême à Saint-Joseph le  19 mars 2023  en l’honneur de notre Saint-Patron,  et malgré un emploi du temps chargé,  il a consacré une heure aux échanges avec les nombreux paroissiens de Saint-Joseph  qui avaient répondu présents avant l’apéritif préparé par des bénévoles.

22 mars 2023 |

* suites de la veillée Laudato’si du vendredi 17 mars 2023

Dans le prolongement de la veillée de Carême, notre 3° chantier a pris de l’élan autour du projet de fresque. En effet, il semble possible de réunir 2 ou 3 dizaines d’enfants au total pour contribuer à la réalisation de ce chantier. Aux enfants de St Joseph et  du MEJ, s’ajouteront les Farfadets des Scouts le 13 mai, ceux des mamans de Notre Dame qui envisagent de créer un groupe Laudato Si,  et quelques  enfants des familles d’exilés ou migrants le 22 avril.

Nous avons donc commencé à penser aux ateliers qui pourraient être organisés les 22 avril, 13 et 27 mai, en plus de l’atelier de réalisation de la fresque qui ne peut pas réunir plus de 10 enfants maximum à la fois. Voici les propositions qui sont déjà parvenues :

1.       La peinture de la fresque. Conception, le 22 avril. Réalisation les 13 et 27 mai. Animation : Camille de 15H à 16H30. Maximum 10 enfants

2.       Un atelier « fresque du climat » pour les adultes. Animation : Blandine Bellart, le 22 avril, de 15H à 17H30

3.       Un atelier «  land art urbain », grands et petits, pour réaliser une création avec des matériaux naturels collectés autour de l’église. Animation : Laura, le 27 mai.
4.       Un atelier « plantation » pour décorer l’espace Laudato Si et/ou les abords de l’église. Animation : Marie Vasseur et les Farfadets, le 13 mai (à confirmer)
5.       Un atelier « modelage-poterie » pour décorer l’arbre de bénédictions. Animation ? date ? les 13 et 27 mai ??
6.       Un atelier « vidéo Laudato Si» réalisé par et pour les enfants. Recueil de « paroles d’enfants », Animation : à définir avec Marie-Odile et Marie Jo, les 13 et 27 mai 

7.       Un atelier « conte biblique » ???

Il ne s’agit pas d’animer ces ateliers à 3 reprises (exception faite de la peinture de la fresque) mais à l’une ou l’autre des trois dates proposées.

Pour préparer cette organisation, Marie-Odile Nouvelot vous propose de lui faire connaître sans trop attendre votre disponibilité :  pour quel samedi, pour combien d’enfants,  de quel âge ?

La   vidéo de la veillée de carême Laudato Si’ du 17 mars 2023 est maintenant sur notre site Youtube.
Voici le lien pour la visionner :
Elle est aussi accessible depuis notre compte Facebook.

20 mars 2023 |

* Rejoindre le « MOUVEMENT LAUDATO’ SI de conversion vers l’écologie intégrale »

  1. Le mouvement de conversion vers l’écologie intégrale se situe dans le prolongement des encycliques Laudato Si (2015) et Fratelli Tutti dans la tradition de la doctrine sociale de l’Eglise. Il recouvre une multiplicité d’initiatives dans le monde entier.
  2. Quelle est sa mission ?

Il s’agit en bref de « protéger la maison commune » en ayant le souci de l’environnement naturel et de toutes les personnes. https://toutestlie.catholique.fr/agir/une-annee-laudato-si

On peut résumer ainsi les principes d’écologie intégrale autour de 7 indicateurs o Répondre à la clameur de la Terre (utilisation accrue d’énergies vertes, efforts de protection et de promotion de la biodiversité,

o Répondre à la clameur des pauvres en défendant toutes les formes de vie sur terre et en portant une attention particulière aux plus fragiles.

o Atteindre une économie écologique (production durable, commerce équitable, consommation éthique, investissements éthiques,etc.)

o Adopter des styles de vie simples (sobriété dans la consommation des ressources naturelles et de l’énergie, éviter le plastique à usage unique, adopter une alimentation respectueuse de l’environnement et saine, utilisation accrue des transports en commun et moins polluants, etc.)

o Développer l’éducation écologique dans nos familles, nos paroisses, nos mouvements et dans les lieux d’éducation.

o Promouvoir la spiritualité écologique, en encourageant un plus grand contact avec la nature dans un esprit d’émerveillement, de louange, de joie et de gratitude.

o Mettre l’accent sur la participation de la communauté pour protéger la création et sur l’implication dans des actions enracinées dans le territoire local.

  1. Des groupes locaux très divers avec des modalités d’action plus ou moins structurées, plus ou moins autonomes. Certains groupes sont paroissiaux, d’autres monastiques, d’autres encore sont en lien avec des organisations, des mouvements, des familles, des écoles, des centres d’accueil, etc. Depuis 2-3 ans, on observe un effort de mutualisation et de structuration de ces groupes avec le soutien du Mouvement et de la plateforme Laudato Si en relation avec l’Eglise catholique.

https://laudatosimovement.org/fr/qui-nous-sommes/

https://plate-formedactionlaudatosi.org/

et avec l’aide d’un label œcuménique Eglise verte (un éco diagnostic, une démarche méthodique) https://www.egliseverte.org/

  1. Des plans d’action assortis d’engagements concrets et révisés régulièrement. Il s’agit de questionner notre relation à Dieu, à soi, aux autres, à la Terre pour construire collectivement chaque année un processus de conversion vers plus de spiritualité, de solidarité, de sobriété, dans une perspective d’écologie intégrale en fonction des ressources disponibles.
  2. Que pouvez-vous faire ?
  • créer ou rejoindre un groupe local ? mettre en réseau des groupes locaux dans un cercle LS? Faire la formation d’animateur LS ?
  • Entrer dans une démarche d’Eglise Verte ?

Pour en savoir plus

  • Regarder le long métrage documentaire sur l’encyclique Laudato si’, intitulé « La Lettre », diffusé le 4 octobre sur YouTube. https://theletterfilm.org/fr/watch-fr/
  • Contacter le référent diocésain à l’écologie intégrale.

Claude Compagnone : ecologie.integrale@eveche-dijon.com

Il a pour mission d’aider les communautés locales à s’inscrire dans une démarche d’écologie intégrale et créer des lieux d’échanges.

  • Pour le doyenné Dijon centre et ouest, contacter la coordinatrice du groupe Laudato Si de la paroisse Saint Joseph de Dijon.
  • Nouvelot 0618016581
18 mars 2023 |

* homélie du 12 mars 2023 (3e dimanche de carême)

par Claude Compagnone, Diacre

(Ex 17, 3-7), (Ps 94 (95), (Rm 5, 1-2.5-8), (Jn 4, 5-42)

Par une coïncidence heureuse le texte de l’évangile de St Jean de ce jour fait écho à la journée internationale des droits de la femme qui s’est déroulée ce mercredi 8 mars. Ce texte de l’évangile porte en effet sur cette rencontre saisissante entre une femme samaritaine – dont on ne connaît pas le nom – qui vient puiser de l’eau à une heure décalée, et Jésus fatigué, assis, seul, au bord d’un puit, en plein soleil. Dans les évangiles, lorsqu’il est précisé que Jésus est seul, c’est pour dire qu’il s’est retiré de la proximité des hommes pour aller prier le Père. Là, il est seul, sans s’être retiré et sans prier. Il est seul tout simplement parce qu’il est épuisé comme nous pouvons l’être nous aussi à certains moments de notre vie, comme nous pouvons être vide, sans énergie.

Il est là, à midi, à un moment donc où personne ne fréquente ce puit, tellement il est plus confortable pour une puiseuse d’eau – car il s’agit bien d’un travail de femme – de venir faire l’effort de chercher l’eau et de la porter quand les températures sont plus fraiches. Jésus est fatigué car inlassablement, il prêche la bonne nouvelle, il guérit et expulse les esprits mauvais, il baptise. Il accompagne les hommes pour une conversion des cœurs et des comportements. Il est fatigué parce qu’il parcourt des kilomètres et des kilomètres à pied, et n’arrête pas d’être sollicité, pressé par la foule, de répondre aux besoins de vie des uns et des autres. Il est donc sans repos et « n’a pas d’endroit où reposer sa tête » comme cela nous est dit en St Luc (9,58).

Etrange parenthèse que cette rencontre de Jésus avec la Samaritaine au cours d’un voyage entre la Galilée, au nord de l’actuelle Israël, et la Judée, au sud. Ce voyage oblige à traverser la Samarie. Tout bon juif qui passe par la Samarie ne s’y arrête pas et ne noue de relations avec aucun de ses habitants, ceux-ci pratiquant une religion que les Juifs méprisent car elle mélange influences israélite et païennes. Et plus grave encore, les samaritains considèrent que le principal lieu saint n’est pas Jérusalem mais le Mont Garizim en Samarie.

Etrange parenthèse, donc, que cette rencontre de Jésus épuisé, au point de devoir attendre que ses disciples ramènent de la nourriture de la ville, et de cette femme, marginale par ses mœurs puisqu’elle a bien été avec des hommes sans qu’aucun ne soit vraiment pour elle son mari. La vie de cette femme, obligée d’aller au puit quand personne ne s’y trouve pour éviter sans doute de s’y faire maltraiter, est une vie de solitude.

Deux solitudes se rencontrent donc au bord de ce puit de Jacob, deux fatigues, et en même temps deux pleines sincérités. Cette rencontre qui nous est relatée est l’une des rares – avec celle de Jésus et de Marie-Madeleine au tombeau après la résurrection – est l’une des rares, donc, qui se déroule sans témoin, en face à face, entre Jésus et une femme. D’ailleurs qui donc a raconté cet épisode pour qu’il nous parvienne ? La Samaritaine ou Jésus à ses disciplines ? Si on ne le sait pas, on en connait en même temps toute l’importance. Si la présence du Juif Jésus, là, au bord du puit, en plein soleil, n’est pas normale, parler, seul, avec une femme étrangère, et qui plus est une samaritaine, rompt avec toutes les conventions, ce qui suscitera la profonde surprise des disciples.

Un dialogue improbable débute alors. Et il commence par une demande que le Christ adresse à la femme : « Donne-moi à boire » lui dit-il. « Donne-moi à boire »… Le Christ a-t-il soif d’eau ? Peut-être… il est fatigué et il n’a rien pour puiser. A-t-il soif de voir la femme venir à Dieu ? Surement, comme on le verra plus loin quand il dit aux disciples que sa « nourriture c’est de faire la volonté de celui qui l’a envoyé ».

Ce « Donne-moi à boire » initial du Christ raisonne donc de multiples façons : il est à la fois expression d’un manque biologique du Christ ; à la fois ouverture d’une relation pratique tout à fait acceptable entre un homme fatigué et une femme dotée de l’outil permettant de puiser l’eau ; à la fois établissement d’une conversation inhabituelle entre un Juif et une Samaritaine, conversation qui rompt les conventions établies ; à la fois démarche de réhabilitation de la femme exclue par son propre groupe social ; à la fois proposition à la femme d’un modèle de demande qu’elle pourrait lui adresser à lui, le sauveur. Ces mots du Christ « Donne-moi à boire » raisonnent comme le don du Christ vers la femme d’un chemin pour le trouver, lui, le Christ.

N’avons-nous donc jamais fait cette expérience de nous trouver sollicités par plus grand que nous et élevés par cette humble demande du plus grand que nous ? Nous avons su alors que nous avions de la valeur. Et Dieu humblement dans notre vie nous dit « donne-moi à boire »…

Le dialogue improbable entre Jésus et la Samaritaine prend la forme d’un long quiproquo qui semble parfaitement assumé par le Christ pour aider la Samaritaine dans son cheminement, dans sa compréhension des choses, dans l’obtention de sa confiance. De quelle eau parle-t-on exactement dans ce quiproquo ? A la fois de l’eau du puit et de l’eau de l’Esprit dont Dieu peut désaltérer de manière durable. De quel puit s’agit-il ? A la fois du puit de Jacob et du puit qu’est le Christ auprès duquel la femme se désaltère sans le savoir. De quel mari est-il question ? A la fois de l’homme avec qui la femme vit actuellement et de celui qu’elle n’a jamais eu qui l’aurait chérie. De quel moyen d’adoration discute-t-on ? A la fois des lieux de Jérusalem et de Garizim qui opposent les Juifs et les Samaritains, et de cette démarche sincère des hommes qui permet de trouver Dieu en eux en esprit et en vérité.

Les fruits de cette conversation du Christ avec la femme sont alors multiples : après une évangélisation éclair de la femme, Jésus lui dit qu’il est le Messie ; après avoir écouté le témoignage de la femme, beaucoup de samaritains croient en Jésus ; après l’accueil de la communauté samaritaine, Jésus et ses disciples demeurent dans cette communauté et ne sont plus simplement de passage en Samarie. La femme a permis à l’improbable d’arriver. La parenthèse du passage en Samarie s’est avérée un des éléments fondateurs de l’action du Christ.

Le Christ aurait-il pu faire cela sans cette femme samaritaine ? Est-elle sans importance et secondaire par rapport aux hommes qui entourent le Christ ? Non ! Elle est là avec sa vie, sa sensibilité et son intelligence des choses. N’a-t-elle pas compris plus rapidement et plus profondément qui était Jésus que nombre des disciples ? Cet épisode de la Samaritaine en périphérie de sa communauté et qui devient centrale pour la conversion de cette communauté ne doit-il pas nous interroger aujourd’hui sur la place laissée aux femmes dans l’Eglise et sur la manière dont nous pourrions arrêter de nous priver d’une partie de leur richesse?

13 mars 2023 |

* homélie du 2e dimanche de carême ( 5 mars 2023)

par Francis ROY, diacre

Nous voici au deuxième dimanche de notre montée vers Pâques. La liturgie de la Parole nous propose des textes qui devraient nous permettre d’avancer joyeusement, en quittant notre routine quotidienne. La première lecture, tirée du livre de la Genèse, nous raconte le début de la grande aventure du peuple de Dieu avec Abraham : « Quitte ton pays et je te donnerai un pays ».

Voilà une première démarche qui nous est proposée : quitte pour recevoir ce que je veux te donner. Tu ne peux recevoir ce que je veux te donner que si tu acceptes de quitter, dans ta vie, tes habitudes, tes manières de penser, tes jugements. Quitte tout, même ce que tu as construit petit à petit, pour découvrir, pour recevoir toute chose nouvelle. Voilà un éclairage lumineux sur la démarche de pénitence de carême. Elle n’est pas un en-soi. On ne fait pas des pénitences pour faire des pénitences ou pour ravir le cœur de Dieu. On quitte pour recevoir de Dieu ce qu’il veut nous donner. C’est le maître mot de la Bible : « shéma Israël, Ecoute Israël ». Fais confiance à ton Seigneur. Et c’est dans ce climat de confiance que, chaque jour, nous découvrons ce que nous devons quitter pour recevoir de Dieu ce qu’il veut nous donner. Une attitude de foi, une attitude de confiance.

Et nous montons avec Pierre, Jacques et Jean sur la montagne en suivant Jésus, parti pour prier. C’est pendant qu’il priait que son aspect fut transformé. Ah Pierre, mon ami, je crois qu’aujourd’hui, tu as perdu une occasion de te taire ! En face de Jésus transfiguré qui s’entretient avec Moïse et Elie, tu aurais pu prêter l’oreille et recueillir quelques bribes du dialogue extraordinaire dont tu étais témoin. Au lieu de ça, tu proposes de planter trois tentes : quelle drôle d’idée ! Peut-être veux-tu que ce moment hors du temps se prolonge ? Te croyais-tu déjà au ciel, dans cette patrie céleste où nous verrons Dieu face à face et où nous serons rassasiés de cette vision ?

Ne t’inquiète pas, tu vas vite être ramené à la réalité terrestre même si une voix du ciel se fait entendre, une voix qui demande, comme jadis à Israël, que l’on écoute : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé, en qui je trouve ma joie : écoutez-le ! »

Eh oui, la vision béatifique qui durera éternellement, ce n’est pas pour tout de suite. Pierre, tu es encore en pèlerinage sur la terre où la condition de disciple, la tienne, comme la mienne et celle de tous les chrétiens, est d’écouter. Alors, avec Pierre, mettons-nous en marche à la suite de Jésus et tendons l’oreille à la Parole faite chair qui nous guide sur la route vers le Père.

Ce récit de la Transfiguration, est-il une manifestation glorieuse de la divinité de Jésus, comme on a trop tendance a le considérer ? N’est-il au contraire une mise en lumière de la réalité de serviteur souffrant du Christ ?

La Transfiguration est une révélation non pas sur Dieu, mais sur l’humanité. Pierre voudrait geler l’histoire de Jésus dans la manifestation de gloire sur la montagne, mais  il faut redescendre à Jérusalem où se passera ce que Jésus a annoncé. Le changement qui se produit a lieu dans les disciples et non en Jésus. Jésus est toujours rempli de la gloire de Dieu. Les disciples ne pouvaient pas voir cette gloire jusqu’à ce qu’ils soient introduits par Jésus dans sa prière. Encore insuffisamment préparés à cette révélation, car ils n’étaient pas encore passés par l’épreuve de la Croix, les disciples en furent fort effrayés. Mais quand ils relevèrent la tête, ils virent Jésus, seul, ayant retrouvé son aspect habituel, qui s’approcha d’eux et les rassura.

Nous sommes appelés nous aussi à être transformés. La plus grande de toutes les visions est de voir Dieu dans notre frère, dans notre soeur. Ayons la foi qui permet cette transfiguration de notre regard. Il est plus important que jamais de témoigner, à travers la qualité même de nos relations fraternelles de notre foi en la dignité de toute personne humaine créée à l’image de Dieu. Notre Transfiguration est liée à un cheminement spirituel progressif. Elle exige une conversion radicale à Dieu, un changement profond des mentalités, le contact et l’acceptation de Jésus  comme Sauveur. Les disciples doivent gravir une montagne, s’isoler des bruits de la terre pour contempler la gloire de Jésus. Ainsi, ne nous décourageons pas si nous rencontrons des difficultés à prier. Dégradation et transfiguration, contrainte et liberté, tout se ramène à nos choix. Nos choix peuvent voiler la lumière et rendre esclave.

Avec ce récit de la Transfiguration, Jésus rassurant nous invite à quitter notre confort pour se tourner vers ceux et celles qui ont besoin. En regardant vers le Christ, nous comprenons que nous sommes en voie de transfiguration. Il nous annonce  qu’au terme de notre combat contre les forces du mal, nous ne sommes pas seuls ; lui le Christ est là avec nous pour nous soutenir, nous porter ; nous sommes appelés à prendre part avec lui à la victoire de Pâques. Le plus important, c’est d’entendre cet appel du Père : « Ecoutez-le ! » Vous pouvez vous fier à lui, je vous demande de l’écouter, de le suivre dans la foi, même si vous ne comprenez pas tout maintenant. »

Cet appel à une vie transfigurée est offert à tous sans exception. Cela change tout dans le regard que nous portons sur les autres. Nous pensons en particulier à tous ces visages défigurés par la famine, les violences, la maladie, les méfaits de l’alcool, la guerre. C’estç) pour chacun d’eux que le Père nous dit : « Celui-ci est mon enfant bien-aimé en qui j’ai mis tout mon amour… » Nous voyons bien que ce monde est défiguré par tant et tant de souffrances, de mensonges et de mépris de la dignité des personnes. Mais nous sommes tirés par l’espérance de la Transfiguration finale. Rien ne pourra empêcher cette promesse du Christ de se réaliser. Alors oui, comme Abraham et bien d’autres, mettons-nous en route à la suite du Seigneur. Montons sur la montagne de la Transfiguration et accueillons Dieu. Lorsque la lumière de Dieu brille, elle nous permet de lui ressembler. Amen

6 mars 2023 |