Emmaüs
pour « l’homélie dialoguée » que nous nous proposons :
Pourquoi donc parler des « Pèlerins d’Emmaüs ? »
Ils rentrent chez eux, ils ne vont pas en pèlerinage. A la rigueur, on peut penser qu’ils étaient allés à Jérusalem en Pèlerinage pour la Pâque ( et pas pour y faire des emplettes !) et on devrait donc dire « les pèlerins de Jérusalem s’en retournant chez eux ».
Alors????
Alors je me dis: Et si le pèlerinage commençait vraiment quand on rentre chez soi, quand « c’est fini »? Ce pèlerinage intérieur, qui n’est plus soutenu par les célébrations extérieures, les prêches, la présence physique des autres pèlerins / pèlerines.
C’est peut-être celui là le vrai pèlerinage.
Père D.N.
dialogue avec J-P. BERTHELOT, diacre
1) Pourquoi comme les disciples nous ne reconnaissons pas Jésus qui vient nous aider à marcher sur notre route ?
Le récit de l’évangile des disciples d’Emmaüs nous situe au soir du dimanche de Pâques. Ils avaient suivi Jésus jusqu’à Jérusalem. Cléophas et son compagnon, (son nom étant inconnu cela nous permet de nous identifier à lui) étaient enfermés dans leur tristesse, leur espoir déçu. Jour après jour, et avec tout ce que Jésus donnait comme enseignement, rien ne laissait prévoir une issue fatale même si Jésus l’avait annoncée. Ils sont désemparés, remplis de peur. Ils s’interrogent sur leur avenir, et peut-être sur leur foi, comme si leur libérateur avait échoué.
Nous aussi nous sommes comme ces disciples : lorsque les événements nous sont favorables, nous sommes pleins d’enthousiasme pour le Seigneur, mais la maladie, l’épreuve, l’isolement surviennent et nous voilà perdus. Il nous faut marcher dans le silence et la prière, rencontrer un ami pour à nouveau nous laisser rejoindre par le Christ. Il nous faut cheminer, faire route, en fait se mettre en mouvement, ouvrir nos yeux à la réalité de la vie et surtout notre cœur. Pour reconnaître Jésus, nous devons être sur la même longueur d’onde de l’amour, du don de soi. Se mettre en route, c’est se plonger dans les écritures, donc relire notre vie à la lumière de Dieu, magnifique soleil d’amour. Cela demande patience et confiance car le temps est une donnée qui n’existe pas pour Dieu et qui est très difficile pour l’homme. Une chose est certaine : notre cœur reviendra tout brûlant d’amour, grâce au Christ ressuscité qui jamais ne nous abandonne.
2) Jésus est-il bien avec nous dans cette période de confinement ?
Dans notre confinement, il nous faut suivre la pédagogie de Jésus auprès des disciples. Commençons par lui dire notre mal-être, raconter notre désarroi, notre déception d’avoir à abandonner nos projets, nos rencontres, ne plus voir nos petits-enfants, grands-parents, voire d’annuler nos vacances. Puis prendre le temps de faire l’expérience de la résurrection dans notre vie personnelle. La foi est une rencontre intime de tout notre être avec Dieu au plus profond de notre cœur. Cette rencontre se réalise par des choses simples : un appel téléphonique que nous n’attendions pas, un sms plein d’espérance, ou une vidéo surprise de la famille. Plein de belles initiatives surgissent dans ces moments-là, sachons les apprécier. Elles sont remplies d’Esprit Saint car à chaque fois, c’est notre cœur qui est en fête et déborde de bonheur. Les disciples le disent : « Notre cœur n’était -il pas tout brûlant en nous » lorsqu’Il nous expliquait les Ecritures sur le chemin. La Parole avait allumé leur cœur. Comme le dit Jésus, notre cœur est lent à croire et vite déstabilisé mais cette rencontre avec Dieu est personnelle, personne ne peut le faire à notre place. Seules les rencontres, l’écoute et le dialogue peuvent nous ouvrir les yeux et l’intelligence.
3) Au cours de notre vie, les rencontres que nous faisons ne sont-elles pas déjà la présence du Christ ressuscité ?
La foi est avant tout une rencontre avec le Christ qui marche avec nous, même si nous n’en sommes pas toujours conscients. Notre cœur s’ouvre à l’amour, à l’image d’une rencontre amoureuse, notre cœur bat très fort, nous nous sentons « pousser des ailes » comme le dit l’expression. Les disciples retiennent l’étranger qui a marché avec eux tellement ils l’ont trouvé intéressant et riche d’enseignement. Ils veulent poursuivre cette conversation, quelle merveille !! Cela arrive aussi dans nos vies, en vacances, ou à l’occasion d’un stage, vous avez fait une rencontre éblouissante, mais peut-être ne reverrez-vous pas cette personne qui pourtant restera un souvenir impérissable. Oui, retenir à sa table est une marque de sympathie, d’amitié, d’hospitalité, une richesse ; l’étranger devient le président de la table comme Jésus l’était parmi ses disciples. Jésus refait les gestes de la cène et ils le reconnaissent. Quelle joie, quel bonheur ! ils voudraient qu’il reste mais il a disparu car le bonheur est furtif. Ce bonheur est à l’intérieur de notre cœur, et grâce à Dieu, il est permanent. C’est ce qui nous permet de rayonner.
4) Ecoute, écoute surtout ne fais pas de bruit, on marche sur la route, on marche dans la nuit. Ecoute, écoute, les pas du Seigneur vers toi, il marche sur ta route, il marche prés de toi.
Oui, n’est-il pas l’ami enfoui au fond de notre cœur que nous oublions trop souvent ?
Le Seigneur est là, dans le cœur des disciples. Ils ont reconnu Jésus dans cette journée merveilleuse pleine de rebondissements. Situation identique pour nous : certaines journées sont tellement extraordinaires par leurs richesses que nous sommes dopés, prêts pour un nouveau départ. Les disciples ont vécu en quelque sorte une messe exceptionnelle :
– Ils ont avoué à Jésus qu’ils étaient perdus, angoissés (c’est la prière pénitentielle)
– Ils ont écouté la Parole de Dieu raconté par Jésus. Quel luxe !!!(ce sont les lectures et l’homélie)
– Ils ont partagé le pain et le vin avec le Maître (c’est l’Eucharistie)
– Ils sont partis en mission le cœur plein de joie (c’est l’envoi)
Oui, ils ont compris le sens de cette journée, et remplis de la présence du Christ au fond de leur cœur, ils partent annoncer la bonne Nouvelle de Jésus ressuscité dont ils viennent d’être témoin.
Confinés ou non, nous avons tous un chemin à parcourir. Sachez bien que le Christ nous rejoint toujours dans la banalité de notre quotidien. Il est avec nous, enfoui au fond de notre cœur mais les évènements de notre vie font que nous l’oublions. Ouvrons les yeux et relisons attentivement ce beau texte qui fait le lien entre le temps de Jésus (les apparitions) et le temps de l’Eglise (la rencontre avec le repas du Seigneur)
Laissons-nous envahir par l’amour divin qui lui est immortel.