HEUREUX, BIENHEUREUX !

POUR LA MESSE DE L.C.E 12/06/2017.

Le premier mot de Jésus à la foule de tous ceux et celles en attente de salut est « Heureux ». On peut être sûr que ces personnes que Jésus déclare heureuses ne se considéraient pas telles ! Et c’est une question pour nous aujourd’hui : si Jésus déclare heureux telle ou telle catégorie de personnes, il y a sans doute un effort de conversion à faire pour nous « retrouver » dans l’une ou l’autre de ces catégories. N’oublions jamais que Dieu nous a crée pour que nous soyons heureux. Le bonheur fait partie intégrante de notre foi. C’est un trésor offert, à nous de le recevoir librement. A nous d’accepter d’être heureux. Il faut du temps  pour comprendre que le bonheur peut être là, au fond de nous, tout en vivant des épreuves difficiles, douloureuses, car le Seigneur a mis en nous sa vie, sa force, sa paix…

L’évangile de saint Matthieu nous donne les neuf grandes béatitudes. C’est la grande règle de vie donnée par Jésus au début de ses discours d’enseignement. Mais savez-vous qu’il existe une centaine de petites béatitudes réparties dans les livres de la bible, en particulier le psautier. « Les petites béatitudes » sont simples. Elles n’ont pas, comme les « grandes » l’air du majestueux portail ouvrant sur la sagesse nouvelle du Christ ! Elles sont plutôt des portes de côté où chacun peut aller et venir dans la vie chrétienne sans se faire remarquer, sans efforts trop grands. Ce sont les portes d’entrée des pauvres, des modestes, des petits que nous sommes, appelés néanmoins à l’unique sainteté. Ces petites béatitudes sont des repères concrets, simples, humains, souvent souriants sur le chemin qui mène à Dieu et à la joie d’être frères et sœurs. Elles sont un art de vivre et en passant par elles nous découvrons une grande variété de trésors. Dieu désire plus que tout notre bonheur et la joie en nous est signe de sa présence.

« Heureux tes gens, heureux tes serviteurs qui se tiennent continuellement devant toi et qui entendent ta sagesse ! » C’est la reine de Saba venu interroger le roi Salomon sur les questions qui la perturbaient qui chante, dans le premier livre des rois au chapitre 10, son émerveillement pour les réponses reçues. Qu’est-ce qui provoque les recherches de notre intelligence et de notre cœur ? Où se tient continuellement notre esprit ? Il y a un choix à faire : que lisons-nous ? Que regardons-nous ? Qu’est-ce qui entre dans notre intelligence, dans notre imagination, dans notre esprit ? Nous ne pouvons pas tout lire, tout voir. Il y a aussi des choses mauvaises qui ne doivent pas entrer en nous parce qu’elles nous détournent de Dieu et des autres. La voie royale de développement de notre vie spirituelle est celle des Écritures. Habité par les psaumes, par les paraboles de Jésus, par les prédications des apôtres, le cœur s’oriente vers Dieu et s’élève jusqu’à la vraie sagesse. Et la Parole de Dieu renvoie au monde ce qui rend nécessaire la lecture du journal !

« Heureux qui est absous de son péché ! » C’est la béatitude du pardon que nous donne le psaume 31. Recevoir le pardon de Dieu est une des plus belles choses que nous puissions vivre en ce monde. Pour prendre conscience de ce bonheur, il n’est pas nécessaire d’avoir commis de grandes et graves fautes, les péchés habituels suffisent ! Il est nécessaire avant tout de comprendre que nos offenses blessent d’une part quelqu’un qui nous aime, Dieu, qui mendie notre amour et d’autre part aussi nos proches. Heureusement, Dieu fait toujours miséricorde, il nous offre son pardon. A nous de l’accepter pour pouvoir pardonner à notre tour.

 »  Heureux l’homme que tu reprends, Seigneur ! (Psaume 93, 12-13) Être repris, « corrigé », pour reprendre le mot fort d’un ami de Job dans une béatitude semblable (Job 5, 17), est-ce un bonheur ? Pour augmenter notre étonnement, lisons la béatitude du psalmiste en entier : « Heureux l’homme que tu reprends, Seigneur, et que tu enseignes par ta loi, pour lui donner le repos aux mauvais jours ». Subir une bonne correction, recevoir un enseignement vigoureux, permettent de nous sortir de ces mauvais jours où nous étions sans la lumière du Seigneur. C’est un étonnement, car nous ne sommes pas habitués à penser qu’une bonne leçon « remet les idées en place », comme nous le disons familièrement. Il nous est bon parfois d’être secoués « pour nous arracher à nos penchants mauvais », selon l’expression liturgique. Nous le savons : des habitudes se prennent vite : celles de critiquer les autres, de rechercher son petit confort personnel, etc. Une longue liste, désagréable, peut être faite ! Or, nous pouvons constater que le Seigneur ne va pas nous « chapitrer » ni établir la liste de tous nos défauts. Nous serions écrasés de honte, et surtout, ce serait inutile, tant la réforme de nos vies est une œuvre inépuisable… Le Seigneur agit autrement. Il ne condamne pas la Samaritaine, il la met devant sa réalité. Ainsi pour nous, il ne montre qu’un seul point, qu’une chose à travailler. Si nous cherchons à « corriger » ce point-là, sa grâce commencera de guérir tout le reste. Dieu ne nous demande pas d’être des héros, mais des femmes et des hommes qui cherchent humblement à se convertir, pas seulement pour leur amélioration personnelle, mais d’abord par amour pour lui et pour autrui.

« Heureux ton élu, ton familier, il demeure en tes parvis ! » Quelle tendresse dans cette béatitude donnée par le psaume 64. Le Seigneur introduit son serviteur dans son intimité. Et tous sont élus car dans l’Ecriture l’élu est l’exemple, le signe de ce que Dieu désire pour tous. Avoir été regardé par Dieu illumine notre personnalité. Les fiancés le savent bien : ils se sont vus et un jour ils ont prononcé le nom de l’autre. Dieu connaît ainsi le nom de chacun. Comment percevoir en notre cœur que Dieu nous appelle à partager son intimité ? Il y a sûrement une part de mystère mais une bonne voie est celle de la prière liée aux événements de notre vie. Celui qui cherche à la lumière de sa prière l’humble sens de ce qui lui arrive, celui qui enfouit dans son cœur les événements de sa vie comme le faisait la Vierge Marie, progressivement voit la lumière monter en lui : un détail, une rencontre, une parole entendue, vont éclairer son cœur attentif. Il ne se sentira plus seul car une présence discrète se fera sentir. Et c’est souvent dans les passages difficiles de notre existence, lorsque les ténèbres semblent s’épaissir sur nous, que nous sentons la main de Dieu prendre doucement la notre pour nous relever. L’expérience pascale, sortir de notre mort pour respirer enfin avec Dieu dans la vie, est le lieu privilégié où nous voyons que nous sommes quelqu’un pour Dieu. Dieu est là pour moi, j’existe pour lui, c’est une nouvelle naissance.

La joie qui jaillit du fond de nous-mêmes permet de traverser les nuits, les orages… Ces « petites béatitudes » nous accompagneront

pour que nous ne manquions pas les portes qui ouvrent sur le bonheur de notre Dieu.

Il ne nous reste plus maintenant qu’à reprendre nos bibles pour partir à la recherche de ces merveilleuses petites béatitudes qui illumineront notre route vers le Royaume.

Amen.

Francis ROY

13 juin 2017 |

homélie de Pentecôte ( 4 juin 2017)

par Claude Compagnone, Diacre

Que faisons-nous de notre liberté ? Que construisons-nous avec cette liberté ? Comment mettons-nous en ordre notre vie pour qu’elle réponde pleinement à la liberté qui nous est donnée ? Que faisons-nous pour que cette liberté soit complète ? Telle est l’interrogation à laquelle nous conduit l’événement de la Pentecôte. Ce n’est donc pas une petite interrogation, une petite curiosité intellectuelle, mais bien une interrogation essentielle qui nous engage dans notre être tout entier, dans notre énergie, nos choix et nos désirs. Mais s’il s’agit bien ici de liberté, il ne s’agit pas d’une liberté que nous aurions arrachée de nos propres mains, à la force du poignet, mais de cette liberté que Dieu nous donne.

 

Dieu nous offre la liberté, soyons en certains ; il n’est pas le Dieu de l’esclavage, il est le Dieu de la liberté. C’est ce que fêtent les juifs et les chrétiens au moment de Pâques. Les juifs célèbrent la sortie d’Égypte, ce moment sans commune mesure dans leur histoire, où Dieu s’est penché sur son peuple et l’a délivré du joug de Pharaon. Nous, chrétiens, nous célébrons à Pâques ce don supplémentaire, ce don suprême que Dieu nous a fait en nous libérant, par son Fils, de l’esclavage de la mort. A travers la résurrection du Christ et de la promesse de la vie éternelle, nous sommes libres. Paul le rappellera maintes fois dans ses lettres, à temps et à contretemps : rien – ni la haine, ni les hommages ; ni le luxe, ni la pauvreté ; ni le malheur, ni le bonheur – rien, ne peut nous arracher cette liberté qui nous a été donnée en devenant enfant de Dieu ; rien, ne peut nous retrancher de l’amour de Dieu.

 

Assurément, libre, nous le sommes, mais comment agir conformément à ce don de la liberté, sans le dégrader, sans le mépriser ? Comment nous laisser orienter et entrainer, comme un bateau aux voiles gonflées du souffle du grand large,  par l’esprit de liberté ? Comme ne pas retomber en esclavage ? En effet, être libre c’est connaître aussi l’inconfort de la responsabilité de ses choix et de ses alliances. Comment donc être aidé dans l’orientation de choix qui soient à la hauteur de notre liberté ?

 

Il faudra aux apôtres ce temps de cinquante jours après la résurrection du Christ pour vivre et ruminer l’interrogation de cette liberté de la vie sans limite, pour être disposés à recevoir pleinement le souffle de l’Esprit de Dieu. Pierre parlera de recevoir « une part de l’Esprit de Dieu », un peu plus loin dans ce chapitre 2 des Actes des Apôtres. Il faudra aux Apôtres cinquante jours de maturation, c’est-à-dire un temps complet, fait de 7 fois 7 jours, pour pouvoir être pleinement des réceptacles « d’une part de l’Esprit de Dieu ». Il leur faudra ne plus savoir quoi faire après le départ du Christ pour accepter de s’abandonner complètement à Dieu et devenir réceptacle d’une part de son Esprit.

 

Nos frères juifs fêtent aussi la Pentecôte. S’il est dit dans le livre des Actes des Apôtres que les Apôtres se trouvaient réunis au moment de Pentecôte, c’est parce qu’ils se sont retrouvés pour fêter, en tant que juifs, l’alliance que Dieu à passer, au Sinaï, après la sortie d’Égypte, entre lui et son peuple. Une fois libéré de Pharaon et avoir traversé la mer Rouge, il a fallu aussi au peuple juif un temps de maturation au désert pour savoir ce qu’il allait faire de cette liberté. Il a fallu qu’il se demande comment il pouvait la vivre, amplement sans la dégrader, sans retomber en esclavage. Les chapitres 19 et 20 du livre de l’Exode nous disent comment Dieu donne alors à son peuple « des paroles », que l’on appellera aussi commandements, pour l’orienter dans le maintien de sa liberté.

 

Dans les Actes des Apôtres, Dieu passe une nouvelle alliance avec les hommes. Il offre alors aux Apôtres, non pas « des paroles » comme au Sinaï, mais son Esprit même : l’Esprit Saint, une part de son Esprit, à lui, Dieu ; il envoie le souffle de ses pensées et de ses paroles, le souffle de sa force de création et d’amour. En envoyant son Fils bien-aimé auprès des hommes pour les délivrer du péché et de la mort, il a franchi un cran supplémentaire dans la liberté offerte aux hommes. A la Pentecôte, il franchit, là-encore, une étape de plus dans l’alliance qu’il scelle entre lui et son peuple : il n’envoie pas « des paroles » comme il l’a fait dans le Désert du Sinaï, mais il envoie « une part de son Esprit », pour que les hommes soient paroles de Dieu.

 

Mesurons-nous vraiment la chance que nous avons de pouvoir recevoir une part de « l’Esprit de Dieu » ? Mesurons-nous vraiment l’importance de cette fête de Pentecôte qui nous dit que les moyens d’être libre nous sont donnés par Dieu ? Création de Dieu, nous le sommes dans la matière de notre personne dont Dieu est à l’origine. Mais création de Dieu nous le sommes encore plus, en surabondance, dans notre esprit, par cette « part de son Esprit » que Dieu met directement en nous, si tant est nous acceptons de le recevoir et d’en être le réceptacle.

 

Cadeau suprême et signe de sa proximité avec l’homme, Dieu nous donne une part de son Esprit. Il en fait le carburant du moteur de notre vie de chrétien, pour nous faire avancer plus loin, pour que nous puissions donner notre énergie d’amour et de création au monde. Il confirme et affermit la liberté gagnée sur la mort en nous donnant, si nous l’acceptons, le moyen par l’Esprit de garder cette liberté. Plus qu’en communication avec Dieu, nous sommes alors par l’Esprit en communion avec lui. Il s’agit de cette communion joyeuse que nous pouvons expérimenter dans la vie de couple ou dans une relation d’amitié quand nous nous savons, sans parler, complètement en accord avec l’autre.

 

Et ce souffle de l’Esprit, Dieu le propose à l’humanité en entier. Les Apôtres, après la venue sur eux du Saint Esprit, se font parole de Dieu pour tous. Ils parlent en langue pour tous, sans limite. L’Esprit de Dieu est généreux, sans frontière, il souffle où il veut et quand il veut, et il grandit en étant partagé. Il rend joyeux.

 

Sœurs et frères, ouvrons notre cœur, rendons-nous disponibles au souffle de l’Esprit pour en être réceptacle. Laissons-nous envahir, dilater et déborder par cette grâce et cette force qui nous dépassent.

Sœurs et frères vous êtes beaux quand vous êtes réceptacle de l’Esprit Saint.

 

Que l’Esprit de Sainteté vienne nous embraser !

 

12 juin 2017 |

GLOIRE AU PERE PAR LE FILS DANS L’ESPRIT

Le SEIGNEUR vint se placer auprès de Moïse.
Il proclama son nom :
« LE SEIGNEUR, LE SEIGNEUR,
Dieu tendre et miséricordieux,
lent à la colère, plein d’amour et de vérité. »
Aussitôt Moïse s’inclina jusqu’à terre et se prosterna.
Il dit :
« S’il est vrai, mon Seigneur, que j’ai trouvé grâce à tes yeux,
daigne marcher au milieu de nous. Et tu feras de nous ton héritage. »

 

Marie-Noëlle Thabut

Ce texte est l’un des plus précieux de toute notre histoire ! Dieu lui-même parle de lui-même : « Il proclama lui-même son nom », dit le texte. Et la réaction spontanée de Moïse qui se prosterne jusqu’à terre prouve qu’il a entendu là des paroles extraordinaires.

Et que dit Dieu ? Il s’appelle « Le SEIGNEUR, Dieu tendre et miséricordieux, lent à la colère, plein d’amour et de vérité. » Ce nom « SEIGNEUR », c’est le fameux mot hébreu, en quatre lettres, YHVH, que nous ne savons pas prononcer, parce que, depuis des siècles, bien avant la naissance de Jésus, le peuple d’Israël s’interdisait de le dire, par respect. Ce nom-là, Dieu l’avait déjà proclamé devant Moïse dans le buisson ardent (Ex 3). En même temps qu’il lui révélait ce qui fut pour toujours, je crois, le socle de la foi d’Israël : « Oui, vraiment, disait Dieu, j’ai vu la souffrance de mon peuple en Egypte, je l’ai entendu crier sous les coups, je connais ses souffrances… Alors je suis descendu pour le délivrer… alors je t’envoie. » C’était déjà une découverte inouïe : Dieu voit, Dieu entend, Dieu connaît la souffrance des hommes. Il intervient en suscitant des énergies capables de combattre toutes les formes de malheur. Cela veut dire que nous ne sommes pas seuls dans les épreuves de nos vies, Dieu est à nos côtés, il nous aide à les affronter, à survivre. Dans la mémoire du peuple juif, ce fameux nom « SEIGNEUR » rappelle tout cela, cette douce pitié de Dieu, si j’ose dire.

d.n.

Avec l’Incarnation, c’est-à-dire le fait que la parole du Dieu éternel puisse devenir de la matière et s’insérer dans le temps, avec la naissance de Jésus et sa résurrection, le mystère de la Sainte Trinité est la réalité la plus forte la plus belle, la plus indispensable.

Par Jésus, le Christ-Parole, au lieu de « croire en Dieu » de la manière extérieure que propose le monothéisme, nous « visitons l’intérieur  du Seigneur Dieu », dans sa vie personnelle, selon la vérité et  la profondeur de ses liens.

Celui qui reçoit le baptême est plongé en Christ. Il est immergé dans la façon d’être et de faire de Jésus. Il accepte d’être nettoyé de tout ce qui empêche la ress

emblance avec Jésus. Il choisit d’être en relation avec les autres et avec le monde comme Jésus. Celui qui accepte cela est libéré de tout pour explorer un monde nouveau. Lorsqu’on est baptisé, la formule dit : « je te baptise au nom de … c’est-à-dire : « à

l’ordre de  ». Je fais un transfert à l’ordre de…» : Tu es trésor du Père et du Fils et de l’Esprit. Tu appartiens à son mystère. C’est Dieu en personne qui plonge en toi. Le Père est celui qui parle ; l’Esprit est le souffle qui porte la compréhension et l’intelligence ; le Fils, celui que l’on voit et que l’on entend, celui que l’on peut toucher et recevoir, pour que nous puissions lui devenir semblables et habiter en Dieu. Ils sont la communion et la communication. Ils sont l’action et la liberté. Le dynamisme de la Sainte Trinité de trois Personnes es

t l’admiration et l’amour : AGAPÈ. Le Père est la source de l’amour ; le Fils est le bien-aimé ; l’Esprit se donne et qui fait qu’on se désire l’un l’autre. En fait, la Trinité est comme une invention du Seigneur lui-même pour nous faire entrer dans sa vitalité. Dieu fait découvrir quelque chose de lui pour rendre imaginatifs autant que lui. Libres autant que lui. Réels, autant que lui.

 

Le Dieu chrétien est un univers en mouvement. La vie chrétienne est un voyage qui donne trois compagnons de route, trois compagnons de vie.  C’est un voyage et un univers qu’on n’en finit pas d’explorer et de découvrir.

9 juin 2017 |