homélie 5ème Dimanche de Pâques

par Claude Compagnonne, diacre

 

Ière lettre de Jean (3, 18-24), évangile de Jean (15, 1-8).

Comment mes pauvres mots, à moi, pourraient-il faire ressortir la brulure des paroles de St Jean ? Comment vous dire combien ces paroles de St Jean me « prennent au ventre » au-delà de tout ce que je suis ? Elles me parlent, ces paroles, de mon lien au Christ et du don de Dieu pour moi. Elles me disent, ces paroles, la tendresse d’un Dieu si grand qu’il vient faire sa demeure en moi. Sa demeure en moi, maintenant, dans ma vie présente…

Combien de fois ai-je ignoré cette douceur de Dieu envers moi ? Ces paroles me disent cette tendresse de Dieu pour moi dans la réciprocité même de la relation que le Christ installe en moi. Je peux demeurer en lui, et lui, en moi. Cette relation me pose dans le monde comme un être plein et entier, à sa place, quelle que soit cette place.

Et pourtant, en quoi, suis-je digne de cela ? En rien… Je ne suis digne en rien de cela par moi-même. Mais je suis aussi digne en tout de cela si j’aime en actes et en vérité. Ma seule perfection viendra de mon amour en actes et en vérité et cette perfection ne viendra que de mon acceptation de l’ouverture que j’aurai envers Dieu, envers les hommes et envers la création.

Mais au-delà de ma relation à Dieu, cette parole me dit aussi notre relation à Dieu, à nous communauté de chrétiens, à nous communauté particulière de Dijon et de St Joseph. Chers sœurs et frères, j’aime à savoir que Dieu demeure en vous, comme vous en lui. Quelle explosion de couleurs et de vie, quelle diversité du monde, quelle chaleur et quelle dilatation du cœur que de savoir que Dieu demeure en vous et que je le rencontre en vous ! Vous que je vois, vous à qui je parle, Christ est en vous et vous êtes en Christ.

La parole de Jean sur la vigne véritable est donc incandescence. Comment pourrait-elle nous laisser intacte, aujourd’hui, si nous acceptons de déposer notre armure pour nous en approcher, cette armure forgée de notre quant-à-soi, de nos peurs ou de nos souffrances ? Aimer en vérité, c’est abandonner cette armure, en acceptant aussi, parfois, en aimant l’autre, d’en être blessé. Abandonner cette armure, c’est accepter, en tant que sarment du cep du Christ, de nous laisser émonder, de nous laisser transformer, malgré les désillusions et les épreuves, pour n’aimer que mieux.

Face à cette parole, nous ne pouvons pas rester à distance comme des spectateurs qui entendraient un beau poème. Cette parole vient nous chercher au plus profond de notre relation à Dieu, au plus profond de notre relation aux autres. Si nous acceptons de nous exposer à cette parole, le souffle de Dieu irriguera notre corps, nourrira notre intelligence et enflammera notre esprit.

Chose incroyable, Dieu veut notre bonheur et veut que nous portions beaucoup de fruits ! Aujourd’hui nous dirions avec nos mots qu’il veut qu’en tant qu’homme et femme nous nous réalisions pleinement. S’il nous veut reliés à lui, ce n’est pas pour nous garder en laisse comme un animal domestique. Non, Dieu nous veut reliés à lui pour nous transmettre la force de vie. Dieu veut nous donner ce qui est bon. Dieu veut notre bonheur et nous dit comment le trouver : en restant irrigué par la sève du cep qu’est le Christ. Sinon nous ne serions qu’une ampoule déconnectée de son alimentation électrique, ne prenant que les couleurs de la lumière des heures du jour et de la nuit, sans luminosité propre.

Notre bonheur et notre réalisation d’homme et de femme ne peuvent être que relationnels. Nous nous réalisons en tant qu’homme et femme qu’en étant connectés à la source de la vie. Ainsi nous pouvons repousser les forces de la mort et de la destruction, et nous sommes hommes et femmes baignés dans la vie, pris dans la vie et pris par la vie.

Le péché est une rupture de cette relation à Dieu. Comment cause ou conséquence de cette rupture, le péché nous isole. Le pardon est la restauration de notre relation à Dieu et aux autres. Et le plus grand des péchés serait de croire, que quelle que soit notre vie nous ne soyons pas dignes de l’amour de Dieu, que nous ne puissions pas obtenir son pardon, que nous devions définitivement renoncer à demeurer en lui et lui en nous. Dans notre orgueil, nous nous considèrerions alors plus grand que Dieu dans notre jugement sur nous-même. Nous serions des sarments coupés du Christ qui se dessèchent.

Notre bonheur est relationnel dans notre attachement au Christ et il est relationnel dans notre attachement aux autres. Il est relationnel dans l’attention et le soin que nous portons les uns aux autres. C’est ainsi qu’il est de notre devoir de défendre la vie de tous les hommes opprimés, migrants, réfugiés, laissés pour compte, malades. C’est ainsi qu’il est de notre devoir de défendre la vie naissante. C’est ainsi qu’il est de notre devoir de défendre la création qui nous est donnée par Dieu. C’est notre devoir et ça nous est vital.

Sœurs et frères, grand est l’amour de Dieu pour nous. Il nous suffit de nous ouvrir pour recevoir ce don de l’amour, il nous suffit de renoncer un peu à nous-même pour nous trouver pleinement en étant en Dieu. Sachons chaque jour laisser grandir notre foi en Christ et croitre l’amour que nous portons les uns pour les autres.

Amen

30 avril 2018 |

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